lundi 22 novembre 2010

Critique | Rihanna • LOUD


Oh, la belle rouge !

C’est à peu près le seul signe avant-coureur intéressant de la sortie d’un album de Rihanna. A croire qu’après avoir créé les mers, les océans, les arbres et les Saisons, Dieu décida de créer le tissage gâté comme signe annonciateur d’une nouvelle catastrophe. Prendre une jolie femme, l’habiller en monstre, en Pokémon, en zoulou ou en sorcière, puis l’affubler d’une méduse sur la tête pourrait être le concept d’Halloween, on a préféré en faire le concept de Rihanna. C’est ainsi que 5 ans après le début de sa carrière, telle une Fran Fine Coulibaly, je trouve nettement plus intéressant de juger son travail en commençant par son apparence plutôt que par sa musique. Car oui, j’ai failli oublier, Rihanna sort son 5ème album nommé LOUD.

Le concept visuel? Des plages naturelles, des champs naturels, des fleurs naturelles et des cheveux en plastique. A cette logique implacable s’apparente The Next Rihanna Level, évolution constante d’une fille dont le seul signe distinctif au cours des années semble être cette manie d’écarter les jambes et de suggérer sa foune à tout bout de champs. On sait qu’en cette Saison le commerce de moules bat son plein sur cette petite île qu’est la Barbade, mais on serait bien tentés de leur renvoyer leur produit avarié lorsque la situation dégénère. Vous l’aurez compris, bien que je reconnais une certaine esthétique à tout cela, le visuel de l’année m’évoque vraiment plus L’Attaque des Tomates Géantes ou une pub pour l’Harissa (dont on connait ironiquement les effets secondaires) que Fantasia et fraîcheur Narta.
Il m’est assez dur de constater que tout est fait pour qu’on tourne la page du joli filon exploité depuis Disturbia/Run This Town avec cette Rihanna caractérielle, pas nécessairement sombre mais munie d’une réelle identité. Il est encore plus dur de réaliser que, comme tout le reste, cette identité semblait être une création de toute pièce et qu’en moins d’un an, Rihanninja s’est transformée en Rihanniaise. A vouloir remettre à plat l’image de Rihanna ils en ont donc fait un personnage plat à l’image de ses fesses. J’ai donc de grosses difficultés à rentrer dans un univers qui n’a pas l’air d’en être un ou se contredit lui-même. On se plait à dire que LOUD n’est pas Good Girl Gone Bad. Que LOUD n’est pas Rated R. Mais alors, qu’est-ce que LOUD?



11 titres dont une Part II, des samples et cette éternelle voix empruntée à Janice de Friends comparable au rot d’une toilette turque, LOUD est un beau pot pourri. Non pas senteur Océan, Automne ou Fleurs Des Champs comme on en trouve partout, mais Sex, Drugs and Autotune, signé d’un R qui veut dire Raté... Ou serait ce Rihanna? 50 producteurs se seraient penchés là-dessus pour produire « l’album le plus personnel de Rihanna » - oui, encore - pour un résultat décrit comme le Thriller des années 2000. On connaît le piètre amour des artistes Américains porté à Michael Jackson, à l’image du We Are The World version bling-bling, je ne me suis donc pas emballé. Pourtant, ils avaient raison. LOUD est un thriller, mais sans la majuscule. Il évoque la peur, celle de se faire avoir par cet album, celle de constater qu’ils essaient vraiment de nous faire croire qu’il s’agit d’une nouveauté ou celle d’entendre la voix de Rihanna sur des sons qui ne sont pas adaptés à sa condition d’ornithorynque.

Au Top 3 des productions les plus dégueulasses on trouve S&M, Only Girl (In The World) et Raining Men, et malheureusement dans le cas d’un album aussi court ça représente déjà 1/3 du projet. Nous refourguer Disturbia sous un nom déguisé était déjà assez FORT, l’agrémenter d’un pseudo-message d’une subtilité Aguilerienne justifie à lui seul le nom de cet album. J’attaque dès à présent Rihanna comme plagieuse de Not Myself Tonight. Non ! N’allons pas chercher plus loin, ça n’est pas comme si elle avait prôné le latex jusque dans sa petite culotte durant l’ère Good Girl Gone Bad, ça n’est pas comme si elle avait poussé la provocation en faisant l’apologie du meurtre et du suicide auparavant. La réelle torture, c’est plutôt de renouveler l’expérience 3 chansons plus loin avec Only Girl et la fin de la marque originale de Rihanna. Elle a beau être la Only Girl à ne pas se rendre compte de ce qu’elle porte sur la tête, la Only Girl à plonger dans les orties et les épines de rose et la Only Girl à enchaîner 5 albums sans jamais avoir assisté à un cours de chant, elle n’est pas la Only Girl à revenir avec un son électro facile, mal ficelé et moche pour tenter d’atteindre les sommets d’iTunes. Le tout placé tranquillement entre 2 ballades mignonettes, dans l’espoir que ça passera inaperçu. Doubidoum faaading. BAAAAM BAAAAM ONLY GIRL INTHAWOOOORLD. Ca-li-fooor-nia. J’ai rien vu, moi non plus.
Plus cohérent, l’idée que les deux seuls featuring de l’album se fassent avec les deux nouvelles sensations Hip-Hop du moment. L’occasion de prouver que Nicki Minaj, c’était marrant 2 minutes mais que ça pue dès qu’on prend le temps de se pencher dessus. 1 an qu’on la connaît, Nicki est déjà Nickée. Entre titres clubs et featuring faciles, on sent donc vraiment en LOUD la supplication de ne pas flopper. C’est là le noyau dur de l’album.

Le 2ème tiers de l’album est une série de ballades, le cauchemard ouvert de tous les fans de la Demoiselle. A vrai dire, les seules bonnes expériences dans ce domaine lui venaient jusque là de Cold Case Love et, dans une moindre mesure, de Take A Bow. Ceux qui ont assisté au Last Girl On Earth Tour auront sans doute eu comme moi cette immense réflexion lors de la partie douce au concert : Rihanna sur une ballade c’est comme manger du Nutella au piment ou écouter la lamentation du Rhinocéros, une expérience unique. Après des visions apocalyptiques comme Unfaithful, on comprend aisément qu’elles se soient faites rares depuis Good Girl Gone Bad. Pourtant, leur (grand?) retour rend son album moins longiligne… Mais plus laborieux. Pourquoi? Déjà parce qu’elle pourra y mettre toutes les forces qu’elle voudra et se remplir de tension à en faire caca comme sur Complicated ou California King Bed, sa voix n’est pas compatible avec les instrus douces qui font généralement les ballades. Ses cris ont l’élégance d’un pet (à partir de Fiiiinger dans California Bed, j‘ai eu le fou rire), et à l’instar de Katy Perry il ne faudrait absolument pas qu’on essaie d’en faire une chanteuse à voix car bon Russian Roulette, c’était bien une fois... Et que si elle continue sur cette voie, la quasi-totalité de ses propres chanson lui seront inaccessibles en Live, le comble. Ensuite parce qu’à essayer de nous vendre son âme on ne fait que se rendre compte que celle ci est faîte de carton-pâte avec une tâche de Shontelle sur le dessus. Rated R tirait sa force de ce côté froid qui lui allait bien, c’était elle, sans hypocrisie aucune. On remarque parce exemple, lorsqu’on la met aux commandes de sa propre version de Love The Way You Lie, que le résultat perd toute notion de hargne. Le message est plus beau sur papier, lorsqu’on lit un texte de Rihanna. C’est avec la finesse d’un terroriste qu’elle tente de transmettre des émotions, mais elle n’a ni la voix ni la motivation pour, alors pourquoi se forcer? C’est justement lorsqu’elle ne se force pas qu’elle réussit le mieux. Fading en bon Take A Bow revival remplit son rôle de petite douceur affectueuse. Oh, Jésus, quelle évolution !

Jamais 2 sans 3, dirait Britney, et la 3ème partie de cette album est de loin la plus réussie. On se doute qu’il y a toute une équipe derrière Rihanna (et dans tous les sens du terme dont les plus dégueulasses), et celle la semble avoir entrepris un petit projet, une petit cohérence entre les mids, à la fois modernes, un peu froids, funs et bâtis pour supporter leurs différences, mais avec une cohérence entre eux. C’est là que LOUD trouve sa véritable identité, balayée entre un coup de seins et les vieilles traces blanchâtres laissées par ces titres destructeurs qui constitueront sûrement la promo de l’album. Skin est sans doute le petit résidu de Rated R de l’album, plus sombre, plus long, plus terne, mais surtout plus travaillé - si on s‘enlève cette fâcheuse impression d‘écouter la démo de Cold Case Love. Puis viennent What’s My Name et Cheers, qui ont tous les deux leur côté djeun’s, niais et un peu ridicule mais bénéficient de la jeunesse retrouvée de la connasse qui les chante. Le tout reste facile et sera sûrement lassant sur la durée mais se trouve être tout ce que j’attendais de LOUD : une Pop qui ne pète pas plus haut que son cul (celui de Rihanna ne permettrait pas un tel exploit de toute façon), simplement amusante voire reposante. Dorée à point pour le printemps, et adoucissant l’image de wesh-wesh qu’elle s’était donnée avec Rated R sans retourner dans l’avalanche surproduite de GGGB. Du neuf, pour du Rihanna. Suivant cette idée, la plus belle réussite de l’album est Man Down, dont le texte m’a beaucoup rappelé G4L et l‘instru Rude Boy. Une chanson avec une identité, mais gardant les recettes simples d’une chanson « pop » accessible. Une version moins dramatique et froide de Rated R. Bref, simplement la preuve qu’elle est encore bonne à quelque chose.

Conclusion?
LOUD est un début de bonne idée noyé dans un déluge de cochonneries. Une chatte grande ouverte, des grognements de poufiasse et un bordel intéressant mais mal organisé, ça rappellerait presque Bionic. En voulant concilier un petit retour à Good Girl Gone Bad et une identité propre à LOUD, le résultat est bancal, trop court, pas fini, et la moitié des tracks semblent faire écho au passé de sa propre discographie. Soigne donc tes passages chez le coiffeur jeune fille, c’est de loin le travail le plus inspiré que tu nous ais jamais produit.
J’attends ton prochain passage à Château Rouge, cuz this is stupid and I‘m not stupid in love,

11/20.

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